Petite suite pour jours obscurs
de Jacques Ancet
sortie le 25 mars 2017
Jacques Ancet, petites suites pour jours obscurs,
Peinture de couverture et exemplaires de tête de Guy
Calamusa
Collection au bord du
livre, éditions Les Arêtes. Sortie le 25 mars 2017.
Vendredi dernier, alors que je présentais Luce Guilbaud,à la
librairie /Galerie l’Archa des Carmes, pour sa lecture croisée de Nuit
l’Habitable et Risques et Reliques aux éditions Les Arêtes, j’ai parlé
très rapidement de la collection au bord du livre, une collection que j’avais
voulu dans les marges, avec un livre au bord d’être un livre, si tant est que
j’ai su, que je sache, ce qu’est un livre, définitivement.
L’idée de cette collection était, avant tout, pour moi, la
possibilité d’interroger ce qu’est un livre, dans son contenu, et dans sa
forme. J’attendais des auteurs qu’ils me confient des textes, des poèmes qui
n’entrent nulle part, des esseulés, des refusés, des expérimentaux… je ne sais
pas si le texte de Jacques Ancet fait partie de ceux là, mais ce que je sais
c’est que c’est un poème qui se trouve toujours au bord de, de quelque chose,
on ne sait pas. Des mots ? Du silence ? des portes ? Au bord de
l’invisible contenu dans les mots ? Au bord de la mémoire…toujours au bord
où tout échappe, monte et descend. Et pas grand-chose à quoi se rattraper, pas
plus à celui qui parle, qu’à ce qu’il voit sans voir.
« Immobile. On l’écoute. On dit qu’on
est au bord, mai de quoi ? C’est le
jour . »
Petite suite pour jours obscurs, une petite suite en
trois actes qui dévident un écheveau de fils assemblé par des mains dont on ne sait pas grand chose. Ni ce que cela signifie, au fond. Et cela commence par une
angoisse, imperceptible, mais une angoisse
« Les mots m’aveuglent, dit-il.
J’entre
dans ce que j’ignore.
Et cependant rien ne bouge
ni
les doigts, ni la lumière
ni le sang contre le mur. »
qui se poursuit et qui se trouve au cœur du poème.
« Je la sens venir.
C’est dans le soir
quelque chose que je cherche comme
une ombre éparpillée tout autour.
Entre la vitre et ses reflets, entre
la lampe, les fleurs et le regard,
une petite peur qui attend
dans un coin. On voudrait la chasser
mais on ne trouve plus que de l’air,
le cœur qui saute dans la poitrine. »
on ne peut y échapper,
« Il dit l’obscur est ma lumière. L’obscur
pousse sous mes mots et je ne les vois plus : je les entends. L’obscur est
ma manière d’apparaître. »
Guy Calamusa est à l’origine de cette publication.
S.P.
Jacques Ancet
Né le 14 juillet 1942 à Lyon. Vit actuellement près d’Annecy.
Agrégé d'espagnol. A enseigné en classes préparatoires aux Grandes Ecoles
littéraires et commerciales avant de se consacrer à son travail d'écrivain et de traducteur.
Poésie]
- "L’Âge du fragment", chronique, Æncrages & Co, 2016.
- Huit fois le jour, Lettres Vives, 2016
- Ode au recommencement, Lettres Vives, 2013
- Les travaux de l'infime, PO&PSY "in extenso", Erès, 2012
- Comme si de rien, L'Amourier éditions, 2012
- Portrait d’une ombre, coll. PO&PSY, Érès, 2011
- Chronique d'un égarement, Lettres Vives, 2011
- Puisqu'il est ce silence, Prose pour Henri Meschonnic, Lettres Vives, 2010
- Les morceaux de l'image, avec Colette Deblé, Ficelle, 2010
- Portrait du jour, La Porte, 2010
- L'amitié des voix: I Les voix du temps II Le temps des voix, publie.net, 2009
- L'Identité obscure, Lettres Vives, 2009
- L'orage vient, La Porte 2009
- Journal de l'air, Arfuyen, 2008
- Entre corps et pensée, anthologie composée par Yves Charnet, le Dé Bleu,2007
- L'Heure de cendre, Opales, 2006
- N'importe où, La Porte, 2006
- Diptyque avec une ombre, Arfuyen, 2005
- Un morceau de lumière, Voix d'encre, 2005
- Sur le fil, Tarabuste, 2006
- La Dernière Phrase, Lettres Vives, 2004
- Le Fil de la joie, La Porte, 2003
- La Brûlure, Lettres Vives, 2002
- On cherche quelqu'un, Dana, 2002
- Le jour n'en finit pas, Lettres Vives, 2001
- La Cour du cœur, Tarabuste, 2000
- Vingt-quatre heures, l'été, Lettres Vives, 2000
- L'Imperceptible, Lettres Vives, 1998
- A Schubert et autres élégies, Paroles d'Aube, 1997
- Silence corps chemin, Mont Analogue Éditeur, 1996
- La Chambre vide, Lettres Vives, 1995
- Le Bruit du monde, Paroles d'Aube, 1993
- Sous la montagne, Messidor, 1992
- De l'obstinée possibilité de la lumière, Éliane Vernay, 1988
- Lisières, Dominique Bedou, 1985
- Passé composé, Le Verbe et l'empreinte, 1983
- Avant l'absence, Éliane Vernay, 1979
- Courbe du temps, Éliane Vernay, 1975
- L'Autre Pays, Plein Chant, 1975
- Silence corps chemin, Thomas, 1973 et 1975
- Le Songe et la blessure, Plein Chant, 1972 et 1974
- La Ligne de crête, Tertium Éditions, 2007
- Image et récit de l'arbre et des saisons, André Dimanche, 2002
- Le Dénouement, Opales, 2001
- Obéissance au vent - IV La tendresse, Mont Analogue Éditeur, 1997 'réed. publie.net 2011, publie.papier, 2012)
- Obéissance au vent - III Le silence des chiens, Ubacs, 1990 (réed. publie.net, 2009, publie.papier, 2012)
- Obéissance au vent - II La mémoire des visages, Flammarion, 1983
- Obéissance au vent - I L'incessant, Flammarion, 1979
- Au Pied du Mur, avant-propos : Nasser-Edine Boucheqif, Coll. Paroles de Seine, Polyglotte-C.i.c.c.a.t, 2013.
- Chutes IV", Alidades, 2012
- L'amitié des voix: I Les voix du temps II Le temps des voix, publie.net, 2009
- La voix de la mer, publie.net, 2008
- Chutes I, II, III, Alidades, 2005
- Bernard Noël ou l'éclaircie, Opales, 2002
- Un homme assis et qui regarde, Jean-Pierre Huguet, 1997
- Entrada en materia, Cátedra, 1985
- Neuf poètes espagnols du vingtième siècle, Plein Chant, 1975
- Luis Cernuda, Poètes d'aujourd'hui, Seghers, 1972
- Vicente Aleixandre : La Destruction ou l'amour, Fédérop, Lyon, 1975 et 1977
- Álvarez Ortega : Genèse suivi de Domaine de l'ombre, Le Taillis Pré, 2012
- Jorge Luis Borges : La Proximité de la mer, 99 poèmes, Gallimard, coll. Du Monde entier, 2010
- Luis Cernuda : Les Plaisirs interdits, Fata Morgana, 1981; Un fleuve un amour, Fata Morgana, 1985; Ocnos, Les Cahiers des Brisants, 1987
- Antonio Gamoneda : Pierres gravées, Lettres Vives, 1996; Froid des limites, Lettres Vives, 2000; Blues Castillan, José Corti, 2004; Description du mensonge, José Corti, 2004; Passion du regard, Lettres Vives, 2004; Clarté sans repos, Arfuyen, 2006; Cecilia, Lettres Vives, 2006
- Juan Gelman : L’Opération d’amour, Gallimard, 2006; Lettre ouverte suivi de Sous la pluie étrangère, Caractères 2011, Com/positions, Caractères 2013
- Ramón Gómez de la Serna : Le Livre muet, André Dimanche, 1998; Lettres au hirondelles et à moi-même, André Dimanche, 2006
- Jean de la Croix : Nuit obscure, Cantique spirituel et autres poèmes, Poésie/Gallimard, 1997, Thérèse d'Avila/Jean de la Croix, Œuvres, Pléiade/Gallimard 2012
- Roberto Juarroz : Fidélité à l’éclair, Lettres Vives, 2001; Quinzième poésie verticale, José Corti, 2002
- Liliana Lukin : Calligraphie de la voix, Alidades, 2013
- Luis Mizón : Province perdue, trad. collective, Les Cahiers de Royaumont, 1988; Jardin de ruines, Obsidiane, 1992
- Alejandra Pizarnik : L'Autre Rive, Unes, 1983; À propos de la comtesse sanglante, Unes, 1999; Cahier jaune, Ypsilon.éditeur, 2012; L'enfer musical, Ypsilon.éditeur,2012; Extraction de la pierre de folie, Ypsilon.éditeur, 2013
- Francisco de Quevedo : Les Furies et les Peines, 102 sonnets, Poésie/Gallimard, 2011
- Andrés Sánchez Robayna : La Roche, Comp'Act, 1995; Sur une pierre extrême, trad. collective, Les Cahiers de Royaumont, Créaphis, 1997; Feu blanc, Le Taillis Pré,2004; Sur une confidence de la mer grecque, Gallimard, 2008
- José Angel Valente : L'Innocent suivi de Trente-sept fragments, Maspéro, 1978; Trois leçons de ténèbres, Unes, 1985; Material Memoria, Unes, 1985; Intérieur avec figures, Unes, 1987; L'Eclat, Unes, 1987; La Pierre et le Centre, José Corti, 1991; La Fin de l'âge d'argent, José Corti, 1992; Au dieu sans nom, José Corti, 1992;Mandorle, Unes, 1992; Paysage avec des oiseaux jaunes, José Corti, 1994; Chansons d'au-delà, Unes, 1995; Lecture à Ténérife, Unes, 1995; Variations sur l’oiseau et le filet, José Corti, 1996; Personne, Myriam Solal, 1997; Trois Leçons de ténèbres, suivi de Mandorle et l’éclat, Poésie/Gallimard, 1998; Communication sur le mur(entretien avec Antoni Tàpies), Unes, 1999; Treize poèmes, Dana, 2001; Fragments d’un livre futur, José Corti, 2002
- Xavier Villaurrutia : Nostalgie de la mort, José Corti, 1991
- Paulina Vinderman: Barque noire, Lettres Vives, 2013
- María Zambrano : Poésie et philosophie, José Corti, 2003; L’homme et le divin, José Corti, 2006
Guy Calamusa
Né au Maroc, Guy Calamusa a longtemps vécu à Casablanca ; il s'est fixé, par la suite, en Provence. Une partie de son travail met en scène des cartes imaginaires à travers lesquelles abondent des symboles récurrents : oiseaux, échelles, barques. Ces différents signes conduisent vers une traversée cachée du monde. Le peintre semble accomplir d'une toile à l'autre un travail de tisserand, comme si à chaque coup de crayon, de pinceau, il fallait démasquer, démarquer ces "voyageurs invisibles". Il expose régulièrement, en France et également au Maroc (Galerie Ardital, Aix-en-Provence, 2008, Galerie Nelly l'Eplattenier, Genève, 2006 ; Cartographies imaginaires, IF Casablanca, 2003 ; galerie Nadar, Casablanca, 2009 ; galerie Chantal Mélenson, Annecy, 2012).
Guy Calamusa est d’origine sicilienne. Il est profondément attaché à la Méditerranée, à cette mer, carrefour des civilisations. Il est né au Maroc en 1965, a poursuivi ses études secondaires chez les pères de Foucauld.
Après des études universitaires achevées à Aix-en-Provence par une thèse en linguistique sur Le verbe et l’instant présent dans l’œuvre de Nathalie Sarraute, il part enseigner à l’étranger. Il partage son temps entre la peinture et l’enseignement.
Autodidacte, son travail met en scène un monde en devenir, en gestation où le peintre d’une toile à l’autre accomplit un travail de tisserand. A travers chaque tracé de crayons, de mots, de signes, de points qui se joignent et disjoignent, le peintre semble recoudre le tissu d’un déracinement intérieur. Par ailleurs, des symboles récurrents —oiseaux, échelles, barques— amènent vers un sens plus caché du monde. On y découvre des oiseaux aux regards interrogateurs, souvent figurés au bas du tableau. Ils semblent avoir perdu l’usage de leurs ailes et scrutent d’un air étonné le centre de la toile. Ou encore ces petits dessins, ces lignes griffées, ces points, ces numéros reconstituent peu à peu la carte d’un voyage imaginaire ou d’un paysage empli de broussaille. Parfois, des petites silhouettes noires stylisées tendent vers le ciel leurs bras trop courts et nous observent. Ailleurs, ce sont des signes posés au hasard de la surface de la toile - chiffres, lettres, enchevêtrements de tracés de crayons gras, secs - posent les jalons d’une écriture hiéroglyphique. A propos de ces signes, dans une lettre adressée au peintre, Jacques Dupin parle d’ « émantation énigmatique » et écrit qu’ils renvoient « à une poésie d’une errance laconique. »
En effet, l’espace dans les tableaux de Guy Calamusa est ouvert, la peinture est « en broussaille » comme si le souci majeur du peintre était de souligner l’aspect inachevé du tableau, l’aspect chaotique des couleurs et par là-même du monde. Un autre aspect de cette ouverture se retrouve dans les rencontres de poètes que le peintre a sollicités ñ échanges de courrier, de dessins, voyages - et qui ont donné lieu à des petits livres d’art. Plusieurs livres ont vu le jour avec Vénus Khoury-Ghata, James Sacré, Toni Maraini, Jeanne Hyvrard, Jean Gabriel Cosculluela, Sylvie Durbec.
Chantal Mélanson